(12 Août 2016) Une ballade classique pour les habitants de la région, l'abbaye d'Aiguebelle à Montjoyer. Il est vrai que pour trouver le calme, il n'y a pas meilleur endroit qu'un monastère, l'occasion pour moi de découvrir le mémorial de Tibhirine dans lequel je n'étais jamais entré, petit rappel des faits concernant l'histoire des moines de Tibhirine...
...le 23 mai 1996, la terrible nouvelle tombe sous la forme d'un communiqué du GIA : "Nous avons tranché la gorge des sept moines".
Frère Luc né en 1914 dans la Drôme fait des études de médecine à Lyon et entre rapidement dans les ordres au monastère d'Aiguebelle. En 1943 il est détenu en Allemagne où il soigne des prisonniers russes. Libéré en 1945, Luc arrive un an plus tard à Tibhirine en Algérie. Repéré comme médecin, il soigne jusqu'à 100 personnes par jour dans les environs du monastère. Son rayonnement est immense. "Jamais on ne pourra l'oublier" témoigne Ouria l'Algérienne. "Pourquoi nous l'ont-ils tué ?" se révolte l'ermite de Tamesguida.
En représailles à l'assassinat du Mufti de Médéa par les français, Luc est enlevé en 1957 par le FLN. Il a très peur :"Nous pensions qu'ils allaient nous passer à la mitraillette, mais finalement ils nous ont relâché". En 1988, l'armée algérienne tire sur des chômeurs et des étudiants, en 1992 les élections législatives sont annulées, l'Islam semble être le seul recours pour une population désabusée. C'est la naissance du GIA, les étrangers sont sommés de quitter le pays. Les moines restent malgré les menaces du GIA et les pressions du gouvernement. "On a toujours le choix de rester lorsque ce qui vous est demandé est contraire à votre conscience" nous explique l’archevêque d'Alger. Octogénaire, ashmatique et cardiaque, Luc soigne inlassablement, panse les plaies morales et physiques de ses amis musulmans.
Le 26 mars 1996 il est enlevé avec ses compagnons par un groupe terroriste et deux mois plus tard on apprend leur assassinat. C'est là que l'on découvre le testament du supérieur Christian qui, aujourd'hui encore, bouleverse jusqu'à l'insupportable les amis algériens. Il pardonne par anticipation à son futur assassin : "À toi l'ami de la dernière minute, […] qu'il nous soit donné de nous retrouver en larrons heureux au paradis. Amen, Inch Allah." Frère Luc ne dramatise pas sa propre mort : "Le jour de ma mort, vous ouvrirez une bouteille de Champagne et vous écouterez Édith Piaf chanter : Non je ne regrette rien.