28/11/2022 de passage à Pont-Saint-Esprit pour une radio, radio pour Madame que nous les hommes n'avons pas à passer...j'aime beaucoup le riche patrimoine de cette ville, patrimoine longtemps tombait en désuétude et qui depuis quelques années semble retrouver les grâces des élus communaux régionaux et autres, je profite de l'occasion de ce passage ici pour m'intéresser à cette "Cazerne " au riche passé.
« Les Cazernes des troupes du Roy » avec un Z à la place du S, non nous ne sommes pas en présence des troupes Russes présentent en Ukraine, mais il ne s’agit bien sûr pas de fantaisie orthographique mais de la manière d’écrire le mot à l’époque, elles auraient accueilli successivement les Dragons du Roy, puis des régiments d’infanterie, sous l’ancien régime jusqu’à la Révolution.
Inaugurées en 1719, ces cazernes ont accueilli de nombreuses troupes pendant deux siècles, des dragons aux régiments d’infanterie, jusqu’à la gendarmerie au milieu du XXe siècle. Baptisé « Pépin » du nom d’un général d’Empire né à Pont-Saint-Esprit, ce lieu imposant a ensuite abrité des services municipaux à partir des années 80 et est devenu aujourd’hui, après une rénovation complète qui aura duré huit ans, le cœur administratif de la ville mais aussi le poumon de la vie associative et culturelle.
Nous pénétrons dans la cours de la caserne par un grand porche couvert. Au début du XIVème siècle, la ville de Pont-Saint-Esprit, grâce à son pont sur le Rhône, unique franchissement entre Lyon et la Crau, est devenue un axe stratégique. Le pont était fortifié et la collégiale a été également englobée dans un ouvrage militaire, qui est peu à peu devenu une citadelle. Des militaires vivaient en permanence dans cette citadelle mais la place manquait dès qu’une nouvelle campagne était ordonnée par le Roi de France. Les troupes de passage étaient donc logées chez les habitants de la ville, qui devaient alors, à leurs frais, subvenir aux besoins des soldats. Par ailleurs, les militaires se comportaient comme des soudards et les exactions étaient nombreuses.
D'énorme portes en bois, du chêne je suppose, garde l'entrée de la caserne, portes qui n'ont plus d'utilité aujourd'hui.
Au début du XVIIIème siècle, les édiles de la commune décident donc de construire une caserne afin de faire cesser ces pratiques et de pouvoir offrir un lieu d’hébergement aux militaires de passage. Cette caserne est construite sur les plans d’Etienne Cubizol, revus par l’inspecteur des travaux de la citadelle, Dastet, ingénieur militaire du Roi. Mais c’est la ville de Pont-Saint-Esprit qui en supporte en grande partie le coût. Au sud-ouest de la cité, près du lieu-dit Latour, il faut combler des fossés qui étaient destinés aux cultures et faire abattre des remparts qui dataient du XIVème siècle.
La volonté de l’architecte était de créer un ensemble d’une grande sobriété : un quadrilatère cerné par quatre pavillons aux angles. La plupart des écrits demeurés intacts évoquent, à sa construction originelle, « un bâtiment bas, mal aéré, mal éclairé, les pavillons noyés dans les ailes ». Sont notées aussi des absences d’ouvertures généralisées, en particulier pour les fenêtres, ce qui rendait l’édifice froid et très vite humide en période hivernale, une passoire énergétique dirions nous aujourd'hui. Néanmoins, cette caserne comprenait, dès le départ, des magasins (réserves), des cuisines, une forge, des ateliers et une prison...de quoi vivre heureux si j'ose dire!
L’édifice est édifié à partir de 1714 et les travaux durent plus de trois ans. En 1719, un sculpteur de Bollène nommé Mézangeau a apposé sur le fronton de l’imposante porte d’entrée, l’inscription « Cazernes des troupes du Roy » toujours visible aujourd'hui. Le lieu est prêt à accueillir ses premiers militaires. Quelques années après le premier conflit mondial, entre 1920 et 1925, les garnisons quittent la ville. La caserne reste militairement inoccupée.
Dès le 11 décembre 1978, parmi les questions diverses du conseil municipal, était examiné le devenir de ce lieu : L’idée de l’ancien édile de 1925 a fait son chemin : en faire un lieu attractif, commercial et associatif, y mêler des structures municipales. Les gendarmes quittent les lieux vers leur nouvelle caserne à la fin de l’année 1979. Aujourd'hui les seuls uniformes que nous risquons de croiser dans cette cazerne ne sont autres que les uniformes des agents de la police municipale. Le reste des bâtiments est transformé aujourd'hui en magasin ou en locaux d'association. Les étages semblent transformé en logements
Un autre passage nous ramène sur le boulevard Gambetta, artère principale très fréquentée de Pont-Saint-Esprit. J'aurais aimé visiter quelques locaux, mais ces derniers ne doivent plus ressembler beaucoup à ceux de l'époque.
En septembre 2018, la nouvelle caserne Pépin est inaugurée. A la fin de l’année, le conseil municipal la rebaptise tout simplement « La Cazerne » avec le « z » qui fait référence à la première dénomination présente sur le fronton du portail. En 2019, le mobilier urbain accueille une sculpture en anamorphose qui achève de faire de « La Cazerne » l’un des lieux de vie les plus accueillants de la cité.
Le 30 octobre 1818, invité par le maire de la commune, Charles François Delmas Philipon, Lieutenant-colonel de la Légion du Gard note la capacité d’accueil de cette caserne : 926 hommes et 80 chevaux.
Le 6 mai 1887, le « Journal du Midi » publie ce texte : « Depuis hier soir, les personnes qui passent sur la place d’armes peuvent lire sur une plaque en marbre blanc que le service du Génie militaire a fait apposer sur le fronton du quartier « Caserne Pépin …». Joseph Pépin est un général d’Empire, né à Pont-Saint-Esprit le 23 mai 1765, tué à la bataille d’El Albuhera le 17 mai 1811.
Cette immense bâtiment n'est autre que l'hôtel dieu de Pont-Saint-Esprit du XVIIe siècle, un autre joli morceau de patrimoine de la ville. Les Visitandines ont fait construire la chapelle de leur monastère en 1639.
La chapelle décorée ensuite en 1742 par un artiste italien, elle doit l’essentiel de son aménagement intérieur à un architecte chargé en 1766 de reprendre les dorures et sculptures abimées par la foudre. Les sœurs de St-Vincent-de-Paul (icônes) puis le peintre Léon Alègre (scènes de vie) ont achevé la décoration très fournie de ce lieu étonnant. La chapelle est aujourd’hui fermée au public et ne se visite que pour des occasions exceptionnelles...peut être pendant les journée du patrimoines que je vais essayé de ne pas rater cette année 2023.