Petit coup d’œil rapide sur la commune de Clansayes à 8 minutes de chez moi d'après Google Maps, et en particulier sur cette tour dite "Tour à Bossage".
Pour ceux qui comme moi ne sont pas censés tout connaître dans le secteur du bâtiment, voilà une question à laquelle je vais répondre, tout d'abord, la question : - Mais qu'est ce que ce "Bossage" ? C'est le nom que l'on donne au parement saillant brut d'une pierre, dont les arêtes seulement sont relevées par une ciselure. Dans des constructions de pierre de taille que l'on veut élever rapidement, en n'employant que la main-d'œuvre rigoureusement nécessaire pour permettre de poser les assises sans perte de temps, on s'est quelquefois contenté de tailler les lits, joints et les arêtes des pierres, sans se préoccuper de parementer les surfaces comprises entre ces arêtes. (Bien visible sur cette photo, les pierres dans l'angle du mur)
Les Romains ont fait usage de ce mode rapide de construire, et, pendant le moyen âge, nous voyons certaines bâtisses dans lesquelles on a laissé des bossages bruts sur la face vue de chaque pierre.
C'est particulièrement dans les ouvrages de fortification de la fin du XIIIe siècle que ce genre de construction apparaît, surtout dans les contrées où la qualité très dure de la pierre ne se prête pas à la taille. Les bossages disparaissent des parements de pierre pendant les XIVe et XVe siècles, pour reparaître au XVIe, avec l'imitation de l'architecture italienne. Ils deviennent même alors un motif de décoration dans l'architecture civile et militaire; ils sont ou bruts, ou taillés en tables, en pointes de diamant, en demi-sphères, comme on peut le voir dans quelques tours fortifiées de la fin du XVe siècle ou du commencement du XVIe. Pendant le développement de l'architecture de la renaissance, on voit les bossages se couvrir de divers ornements, tels que vermiculures, emblèmes, chiffres, réseaux, etc.
Le bossage, largement répandu dans l’Antiquité mais quelque peu occulté durant plusieurs siècles, se répand dans l’architecture militaire royale française vers la fin du XIIIe siècle. Les différences relevées dépendent notamment de l’époque, des commanditaires et de la zone géographique. Les musulmans et les Francs de Terre sainte l’utilisent couramment pour leurs remparts, de même que les potentats de l’Empire germanique. A compter du milieu du XIIe siècle, l’Alsace se couvre ainsi de pierres à bosses taillées dans l’élégant grès rose des Vosges. Il est parfois avancé que le bossage renforce la cohérence des murailles contre l’impact des projectiles. Cette hypothèse n’a à ce jour jamais été prouvée. On peut en revanche y déceler une certaine recherche esthétique, plus souvent présente qu’on ne le pense dans l’architecture castrale. Mais c’est sans doute du côté de la symbolique de l’autorité, de la représentation du pouvoir, qu’il nous faut en rechercher sa cause profonde. Le bossage rompt la platitude des parements et confère aux édifices qui en sont pourvus une véritable impression de puissance. Le soleil y crée un jeu d’ombres et de lumières saisissant.